La décentralisation est un important sujet d’écologie humaine. Son enjeu est essentiel : rapprocher la décision politique du citoyen, instaurer une authentique démocratie de proximité, permettre une véritable participation de tous à la vie politique.
Elle est une réponse à un inconvénient majeur de la centralisation qui existe en France depuis très longtemps : la distance entre les représentants et les représentés. Plus cette distance est importante, moins il y a de participation des citoyens. Moins il y a de participation, plus la décision politique se fait dans une logique d’intérêt général « imposée » à la nation, et non dans un esprit de bien commun discerné avec l’implication de chacun.
UNE ORGANISATION TERRITORIALE COMPLEXE
“Il n’y a pas que le « millefeuille administratif » mais aussi le « dédale administratif » qui crée un fossé entre les représentants et les représentés.”
Il y a actuellement trois collectivités territoriales : la commune, le département et la région. Elles se superposent. Elles ont des compétences propres mais en plus possèdent toutes la « clause générale de compétence » qui leur donne la liberté de prendre en charge un grand nombre de nouvelles attributions. A cela s’ajoute une myriade d’établissements publics, de syndicats mixtes, regroupant des collectivités et parfois d’autres acteurs comme l’Etat. Nous pouvons citer les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) que sont les communautés de communes, les communautés d’agglomération, les communautés urbaines et les métropoles. Ces EPCI jouent actuellement un rôle essentiel, mais leur fonctionnement est très complexe car leurs compétences varient d’un territoire à l’autre et ils sont sujets aux négociations entre élus locaux. Toutes ces structures s’empilent les unes sur les autres, parfois leurs compétences se chevauchent… Ce problème a été surnommé le « millefeuille administratif » et il pose une réelle question d’intelligibilité par les citoyens.
En plus, d’autres structures peuvent venir s’encastrer à l’intérieur d’un même groupement de communes. Il n’est pas rare qu’à l’intérieur d’une grande communauté urbaine il y ait des syndicats intercommunaux qui ne concernent que quelques communes pour un sujet précis. Cela aboutit à des situations extrêmement compliquées que ne peuvent comprendre la majorité des administrés et qui dépassent les élus. Nous pouvons qualifier cette situation de « dédale administratif ».
Il n’y a pas que le « millefeuille administratif » mais aussi le « dédale administratif » qui crée un fossé entre les représentants et les représentés.
Il s’agit d’une vraie question d’écologie humaine car l’enjeu est non seulement la proximité mais aussi l’efficience et la clarté du système.
POINTS DE REPERES POUR UNE REFLEXION D’ECOLOGIE HUMAINE SUR LA DECENTRALISATION
Nous sommes appelés à poser quelques critères de réflexion pour une approche de la question du point de vue de l’écologie humaine :
- L’organisation des collectivités locales est-elle suffisamment intelligible pour être comprise par tous les citoyens, et ainsi permettre leur participation ?
- Le territoire d’une collectivité territoriale est-il suffisamment grand pour être efficace et suffisamment petit pour être proche du citoyen ? Souvent, des spécialistes proposent de supprimer le département et de regrouper des régions, mais n’allons-nous pas aboutir à une recentralisation ? Au centralisme parisien succéderait un centralisme dans les grandes capitales régionales, ce qui ne change guère.
- Le périmètre d’une collectivité doit-il être dessiné selon une logique abstraite (distances géographiques, espaces économiques), ou au contraire selon des territoires historiques porteurs d’une identité, d’une culture locale ? Quelle logique doit prédominer ? Peut-on conjuguer les deux approches ?
- Les compétences des territoires sont-elles pertinentes ? En ont-elles trop ou pas assez ? Faut-il un pouvoir législatif accordé aux régions ? La France deviendrait alors un Etat fédéral, comme l’Allemagne et elle aurait franchit un cap historique. Est-ce nécessaire ?
Nous avons quatre problématiques et les réponses varient. Une approche de la décentralisation du point de vue de l’écologie humaine est donc à construire.