Hawa Mahal, le somptueux palais des vents de Jaipur

14 Sep, 2023 | HABITAT & ARCHITECTURE

Le Hawa Mahal est une merveille d’architecture. Sa beauté incontestable a fait sa renommée, mais le réel génie de sa conception reste peu connu. Le palais répond parfaitement aux exigences climatiques des saisons locales, notamment aux fortes chaleurs de l’été.
Auteur : Émeline Julia

Façade arrière du Hawa Mahal

L’histoire du Hawa Mahal

Le Hawa Mahal date de 1799. Il se trouve à Jaipur, la capitale du Rajasthan, en Inde. L’architecte Lal Chand Ustad, commissionné par le mahârâja Sawâi Pratap Singh, se serait inspiré de la couronne de la divinité Krishna pour réaliser son œuvre. Cette source d’inspiration se révèle surtout sur les cinq étages de la façade arrière du bâtiment. Ces 15 mètres de façade constituent l’attraction principale du Mahal, qui compte près d’un million de visiteurs chaque année.

En plus d’être une merveille d’architecture – d’un point de vu purement esthétique – le palais est une véritable exception technique car il est le plus haut édifice érigé sans fondation ! Construit en grès rouge et rose, le palais s’inscrit dans la continuité des traditions architecturales moghole et radjpute.

Le Palais des Vents

Malgré son nom (littéralement “palais des vents”), on ne considère pas réellement le Hawa Mahal comme un palais. La façade impressionnante abrite un intérieur relativement sobre et peu de surface habitable. L’espace intérieur servait principalement d’extension du lieu de vie des femmes de la famille royale. Elles profitaient notamment des 953 jharokhâ (lucarne ou judas) pour observer la rue sans être vues en retour, ce qui leur était interdit.

L’abondance d’ouvertures qui donne à la façade son aspect de ruche possède une autre fonction : elles permettent de générer de nombreux courants d’air pour rafraichir le palais lors de fortes chaleurs. Vous vous en doutez : c’est de là que l’édifice tire son nom de palais des vents.

Une architecture adaptée aux saisons

Outre les nombreuses fenêtres permettant une meilleure circulation de l’air lors des chaleurs estivales, le palais comporte de nombreuses caractéristiques témoignant d’une conception architecturale en phase avec son environnement. D’après l’architecte Shyam Thakkar, interrogé par CNN, “l’orientation du Hawa Mahal sur un axe est-ouest s’aligne sur la trajectoire des vents dominants dans la région”. L’architecte explique également qu’une fontaine placée dans la cours du palais apporte de l’humidité et de la fraîcheur au vent et permet de remonter la chaleur en conservant l’air frais près du sol. Ce même air pénètre ensuite le bâtiment et, par l’effet Venturi qui augmente la vélocité en diminuant la pression, rafraichit les pièces.

Ce bâtiment vieux de plus de deux siècles nous propose donc un exemple inspirant d’une architecture pensée et construite en symbiose avec son environnement. En plus de l’aspect technique de la circulation de l’air, des éléments plus simples sont également à l’œuvre dans la régulation de la température, notamment l’utilisation de la chaux, un matériaux que les peuples de Jordanie utilisaient déjà en – 7 500 ans avant J.-C et qui est un allié incontournable de la rénovation et de l’écoconstruction.

Non content de concevoir un édifice permettant d’adoucir les étés indiens, l’architecte Shyam Thakkar a agencé différentes parties du palais selon les spécificités de chaque saison. Ainsi, les résidentes royales jouissent d’un confort thermique tout au long de l’année. Penser nos bâtiments pour les optimiser thermiquement en fonction de leur environnement – plutôt que de faire fi des conditions environnementales grâce à la technique moderne – est une piste à explorer, un futur souhaitable.

Le Hawa Mahal, une inspiration pour l’architecture moderne ?

Nous le voyons déjà, le réchauffement climatique s’accompagne de phénomènes météorologiques de plus en plus violents pour le vivant. Les logements mal isolés sont source de paradoxe : la climatisation, de plus en plus répandue, représentait en 2020 5 % des émissions du secteur bâtiment ; elle contribue également à la formation d‘îlots de chaleur urbains.

Plutôt que répondre aux canicules à venir par une fuite en avant techniciste qu’incarne la climatisation, des solutions low-tech, basées sur des matériaux intelligemment choisis, paraissent bien plus adaptées. Puiser dans le répertoire des connaissances de l’humanité, s’inspirer de l’affinité ancestrale de peuples avec leur territoire, pour inventer de nouvelles manières d’habiter qui permettent un certain confort sans reposer sur une extraction démesurée des ressources planétaires, voilà le défi des architectes qui se font acteurs de la transition !


Poursuivez votre lecture sur l’architecture : la restauration de Chiry-Ourscamp : un chantier écologique

Je soutiens le Courant pour une écologie humaine

 Générateur d’espérance