François-Xavier Bellamy, philosophe, rappelle les fondements anthropologique du Courant pour une écologie humaine.
« Il nous faut donc reconnaître notre vulnérabilité pour construire ensemble une société de la bienveillance. »
“Ça va ? Ça va vraiment ? Avez-vous remarqué le caractère très étrange de cette question que l’on se pose quinze fois par jour : « ça va ? » C’est bizarre d’entrer ainsi en relation avec les autres. C’est une drôle de question. C’est d’ailleurs presqu’une injonction. Avez-vous remarqué à quel point il est très difficile de répondre par la négative à cette question ? C’est une obligation : nous vivons dans une société où « ça va », où il faut que ça aille. On
ne sait pas très bien où ça va, d’ailleurs, mais… ça va ! Il faut que ça aille et il faut que ça se voit. Mais pour ceux qui, précisément, ça ne va pas, peut-être avez-vous déjà constaté le caractère un peu dérisoire de cette question : « ça va ? » Quand vous avez devant vous quelqu’un qui, de toute évidence, a connu une grande tragédie dans son existence, quelqu’un qui traverse une grande épreuve, vous le regardez et vous lui demandez « ça va ? » et, immédiatement, vous vous en voulez de cette question parce qu’elle vous semble complètement ridicule. Il ne peut plus y avoir de bienveillance dans une société qui se donne pour impératif la volonté d’être heureux et d’afficher son bonheur.
Je crois qu’il ne peut pas y avoir d’écologie humaine sans la conscience de la fragilité, sans la conscience que nous avons de notre propre vulnérabilité.
La fragilité n’est pas un accident, la souffrance n’est pas un accident, la vulnérabilité n’est pas un accident, la maladie, la mort, la vieillesse ne sont pas des accidents de la vie. Ce sont là la nature-même de nos vies. Elles font partie de nos vies et elles sont, d’une certaine façon, la condition de toute société. Car si nous vivons en société, si nous sommes en relation avec les autres, n’est-ce pas grâce à la brèche que constitue dans chacune de nos vies ces fragilités qui nous habitent et qui nous hantent ? Il nous faut donc reconnaître notre vulnérabilité pour construire ensemble une société de la bienveillance, pour l’élaborer, la penser, la construire à hauteur d’homme.”
Cette intervention a eu lieu dans le cadre des premières assises du Courant pour une écologie humaine, pour une révolution de la bienveillance, en décembre 2014.