Dans le cadre du parcours de form’action Cap 360° sur le thème « Eduquer », nous avons rencontré Frédéric Prat, à Marseille. Son discours construit dû à une longue expérience terrain et à une maturation théorique poussée, nous a décidés à vous le présenter. Voici donc le portrait d’un homme de conviction.
Un combat : l’échec scolaire
Ingénieur de formation, Frédéric Prat est devenu héraut de l’éducation, qui instruit et élève. Mais ça, c’est l’aboutissement d’une histoire qui a commencé il y a une vingtaine d’années dans l’enseignement secondaire (collège/ lycée) en physique-chimie. C’est au cours de cette expérience que Frédéric a pris conscience des différents écueils des pédagogies enseignées actuellement au sein de l’éducation nationale.
Enquête rapide : à travers les faiblesses et les failles de ses élèves de lycée, il a découvert que, bien souvent, les causes sont à trouver dans les classes primaires. Et de là, il a vite repéré que ce qui générait l’échec scolaire des plus grands résultait des différentes méthodes d’apprentissage de lecture professées. Depuis, Frédéric met toute son énergie à pallier les carences provoquées chez les plus jeunes par ces méthodes pas toujours adaptées.
Diversifier les méthodes de lecture
Le postulat est le suivant : les démarches essentiellement globales et visuelles, très répandues aujourd’hui dans les classes primaires de l’éducation nationale, ne sont en réalité adaptées qu’à une petite partie des élèves. Elles laissent ainsi pour compte une grosse partie des élèves et donnent aux autres la possibilité de réussir, sans trop savoir ni pourquoi, ni comment, développant une pensée intuitive et rapide – parfois approximative – et une mémoire peu aguerrie, au détriment de talents ignorés et des ressources personnelles inexploitées…
Les méthodes généralement favorisées dans l’enseignement actuel paralysent dès le départ les auditifs, lesquels ne s’accommodent pas de solutions de facilité. Ils deviennent sujets d’incohérences : ainsi, des enfants « naturellement » littéraires peinent à apprendre la lecture, parce qu’ils sont auditifs et que l’approche globale ne leur convient pas : un comble !
Cette problématique, Frédéric l’a prise à bras-le-corps, en tant que président de Lire-Écrire, une association créée par Gilbert Sibieude, grand-père soucieux de voir les difficultés de son petit-fils face à l’apprentissage de la lecture. Au côté de nombreux experts, l’association réalise un travail de fond pour sensibiliser parents et enseignants aux problématiques pédagogiques.
« Donner à chacun la réussite qu’il mérite. »
C’est un maître mot pour Frédéric Prat qui martèle qu’ « il n’y a pas d’enfant idiot ! Aucun ! ». Il récuse l’obsession de nommer des pathologies scolaires (dyscalculie, dyslexie…) quand il faudrait avant tout remettre en question l’enseignement et non l’enseigné.
« La meilleure pédagogie est celle qui réduit le mieux les inégalités » déclare Frédéric Prat. Bien sûr, il y a des solutions, par exemple les méthodes alphabétiques pour ce qui est de l’apprentissage de la lecture (Pour n’en citer qu’une : Je lis, j’écris). Il s’agit de donner aux enfants, dès le départ, les mêmes bases pour avoir les mêmes chances de réussir. L’enseignant ne doit pas attendre que les enfants aient des connaissances préalables. D’où l’importance pour l’expert de favoriser un apprentissage explicite, progressif et structurant.
Tout l’art est de savoir varier les plaisirs. Un éducateur en or est celui qui sait manier avec habileté la diversité dans la manière d’approcher telle lettre, tel calcul, en s’adaptant aux aisances naturelles des élèves. De fait, offrir dès le départ plusieurs approches, c’est permettre à l’enfant de se connaître, et savoir au plus tôt quel est son point fort : une force inouïe, sur laquelle il peut s’appuyer pour ensuite traduire les informations dans sa propre langue et s’adapter.
C’est ce que permet la très belle pédagogie de la « gestion mentale » théorisée par Antoine de la Garanderie. À cela, ajoutez les travaux d’Elisabeth Nuyts, et vous aurez toutes les clés pour offrir une formation adaptée à chacun.
La maison, l’école et le patro !
Cette philosophie du « connais-toi toi-même » est une ressource intarissable où parents, éducateurs, animateurs sont au diapason, pour faire grandir les enfants.
Elle se vit aussi dans le patronage +Avenir, dont Frédéric s’occupe à Marseille. C’est un lieu privilégié où les enfants se retrouvent après l’école pour un accompagnement scolaire et éducatif. Le suivi de proximité et l’implication des parents permettent d’encourager l’enfant et de l’aider à donner le meilleur de lui-même. Les parents doivent être au courant des pédagogies utilisées et peuvent parfois être assistés s’ils le souhaitent, pour ne pas générer une pression pouvant annihiler et bloquer les enfants. Ainsi ces derniers sont-ils toujours poussés à donner le meilleur d’eux-mêmes. C’est aussi un lieu où les enfants peuvent se révéler ailleurs que dans les exercices scolaires et accroître leur confiance en eux.
Cette structure aurait vocation à travailler avec les écoles, qui, malheureusement se satisfont souvent de leur compétences propres et ne favorisent pas la collaboration. Leurs regards croisés seraient pourtant fructueux et permettraient de mieux comprendre certains enfants. Un projet qui devrait voir le jour l’année prochaine. « Duc in altum » est cette nouvelle aventure dans laquelle se lance Frédéric, fort de son expertise en éducation. La direction commune d’une école et d’un patronage, de l’instruction et de l’éducation, facilite la communication entre les deux et promet un accompagnement long et cohérent.
Un chemin que Frédéric Prat initie pour pouvoir le multiplier par l’étude scientifique de ses richesses.
D’aucuns disent que 20% d’échec scolaire, ne pourront être résorbés – quoi qu’il arrive -. Le Monde chiffre : « Chaque année, environ 140 000 jeunes sortent du système éducatif sans diplôme. » Le projet “Duc in altum” veut relever le défi et combattre cette fatalité : beau programme !
En savoir plus : https://www.helloasso.com/