Un voyage en humanité

13 Juin, 2017 | FAMILLE, SOLIDARITÉS & SOCIÉTÉ, LES INITIATEURS

Tugdual Derville, co-initiateur du Courant pour une écologie humaine, raconte l’histoire de l’association “À Bras Ouverts” qui fête ses 30 ans. « Favoriser les rencontres et les amitiés entre les personnes exclues à cause de leur fragilité et les personnes qui “réussissent” grâce à leurs capacités […] est source de vie, de guérison et de transformation pour tous ». Un livre fort, émouvant, fondateur, qui ouvre à toujours plus de vie.

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L’histoire

Lourdes, 1982. Tugdual Derville a 20 ans quand il découvre avec émerveillement le visage de Cédric, petit garçon porteur de handicap. Le déclic est immédiat. Dans l’amitié qui naît avec cet enfant, Tugdual découvre la profondeur de l’humanité révélée par les personnes les plus fragiles. Commence alors une aventure humaine qui le conduit, en 1986, à fonder l’association À Bras Ouverts, avec des amis de plus en plus nombreux.
L’objectif : offrir aux jeunes porteurs de handicap des occasions de sortir de leurs institutions ou de leur famille pour vivre ensemble quelques jours de pur bonheur, malgré les épreuves.

 

Un aperçu (parce que vous le valez bien)

Avec simplicité et pas mal d’humour, Tugdual relate rencontres et péripéties qui en découlent, au fil de la naissance et de la croissance d’À Bras Ouverts. Ci-dessous, quelques morceaux choisis :

« J’ai souvent noté la propension de certaines personnes durement éprouvées à ressentir et exprimer une grande finesse de compassion pour ceux qui souffrent. Il y a des personnes qui s’enferment dans leurs peines, leurs traumatismes, leurs deuils… mais d’autres semblent être humanisées par ces expériences douloureuses.”

« Le monde serait tellement plus sage s’il prenait conscience que bonheur et épreuve, joie et larmes, crise et croissance, sont compatibles ! Nous l’apprenons progressivement… Au début d’À Bras Ouverts, nous nous verrions bien comme des distributeurs automatiques de bonheur, peut-être même des sauveteurs capables de faire oublier le handicap. Mais quand un enfant plafonne ou entre dans une phase de crise ou de régression, notre moral est mis à rude épreuve. Parfois, celui que nous trouvions « facile », « adorable » pendant la phase de découverte, quand ses talents nous étaient progressivement révélés, finit par nous lasser. L’aridité des relations succède au premier enthousiasme. Il nous faut trouver un autre sens à notre action, tenir dans la présence, malgré les apparences. Nous ré-enracinons alors notre motivation dans quelque chose de plus humble, de plus abandonné. L’expérience de l’aridité est une phase féconde de toute relation durable, qu’elle soit amicale ou amoureuse. Étape d’assainissement. Passage obligé vers l’amour véritable. Le seul qui soit durable. »

« Beaucoup d’entre nous ont davantage appris sur l’âme humaine avec les enfants (et aussi leurs parents et les professionnels) qu’en assistant à leurs cours. Ce fut là notre école. École de vie, où l’on apprend à se trouver en donnant. École de futurs parents où l’on comprend le sens de l’accueil inconditionnel de l’autre, avec ses fragilités, ses dépendances. École de la joie, où l’on mesure la valeur des réalités gratuites les plus simples. École du dépassement de soi, où l’on se découvre capable d’efforts impensables. École d’humilité où l’on se heurte à ses propres difficultés, à sa capacité à rejeter l’autre, où l’on consent à ne pas en rester à ses échecs et à ses indignités. Il ne se passe pas un jour sans qu’une réminiscence d’À Bras Ouverts ne m’inspire une réflexion utile. Ou résonne comme un appel à retrouver l’élan du cœur que les années ont pu affadir. »

« Quel paradoxe ! À Bras Ouverts, dont la fondation repose sur la souffrance, se caractérise par l’innocence, l’insouciance et la joie ! Qu’un enfant se mette à gémir, hurler, se débattre, tout le groupe consent à ce qui se passe, au mystère de l’épreuve, en prenant parti essentiel : ne pas en faire un drame. C’est la vie ! Nous ne laisserons pas cet événement effacer la douceur quotidienne. Quelques mots, parfois un seul regard complice entre deux accompagnateurs suffit : le binôme s’écarte sans hâte pour retrouver la paix… Personne ne s’étonne. Personne n’en rajoute. Les enfants eux-mêmes sont souvent capables de trouver le mot qui apaise. L’atmosphère qui règne dans les activités d’À Bras Ouverts est indicible. Comment se fait-il que les lieux les plus éprouvés soient ceux d’où jaillit la joie la plus authentique ? Les travailleurs de l’humanitaire débarquent dans des pays où sévit la misère sont souvent stupéfaits par la joie des pauvres. »

 

Notre avis

On à la chance d’assister à l’émergence d’une véritable école de vie, sous la plume vraie, vivante et toujours très humaine de Tugdual. Une lecture qui remue les entrailles, donne la pêche et encourage à s’ouvrir, toujours plus, à la beauté – parfois pas si évidente au premier abord – de notre humanité.

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