Pour fêter les 3 ans du Courant pour une écologie humaine, nous avons publié un album anniversaire. Cela a inspiré Fabrice de Chanceuil, journaliste, qui a eu la bonne idée de partager sa prose avec nous :
“A l’occasion du troisième anniversaire de sa fondation, le Courant pour une Écologie humaine vient de publier une plaquette retraçant son action au cours de la période écoulée et proposant quelques pistes pour l’avenir en adoptant néanmoins le principe selon lequel « c’est en marchant que se fait le chemin ». Au moment où sont lancées les grandes manœuvres en vue de la prochaine élection présidentielle, il est stimulant de se pencher sur ce document qui n’est pas un programme politique mais qui propose des balises bien nécessaires en ces temps qui manquent cruellement de repères et que nos candidats seraient bien inspirés de faire leurs.
L’écologie humaine, en dépit de la clarté de son énoncé, reste un concept abstrait pour beaucoup qui peuvent s’interroger, à juste titre, sur son rapport à l’écologie. Lors des assises du Courant, tenues en décembre 2014, un philosophe avait apporté une réponse explicite en indiquant que nous sommes entrés dans une ère géologique où l’Homme s’est réinscrit dans la nature. C’est l’ « anthropocène », marqué par un fort impact des activités humaines sur l’environnement qui trouve aujourd’hui ses limites au point de mettre le monde en péril. Or, ce n’est pas la technique qui parviendra à donner la solution. Plutôt que de miser sur sa supposée surpuissance sur les éléments, l’Homme doit, au contraire, se faire modeste et reconnaître sa vulnérabilité. S’il n’est pas au-dessus de la nature, l’Homme n’en est pas davantage un sous-produit et il lui appartient de trouver sa juste place en reconnaissant, dans l’environnement, un bien commun dans lequel vivre ensemble. Cette vision n’est pas séparable de la reconnaissance de la propre nature de l’Homme dont l’épanouissement ne peut résulter que de l’agrégation des différentes dimensions de son être.
Ainsi, comme l’indique le Manifeste du Courant « Construire ensemble notre maison » adopté en août 2015 : « Nous devons prendre en compte autant les conséquences naturelles de nos activités sur notre milieu, la qualité de l’air et de l’eau, les équilibres ou la diversité des vivants, que leur conséquences sociales sur la famille, l’appartenance à un peuple et à son histoire, le territoire et le temps collectif ou encore les langues et les cultures qui assurent la possibilité d’un discours commun. Car c’est « un tout ». Il appartient à chaque génération de léguer aux générations futures, non seulement une planète habitable, mais aussi des repères anthropologiques propres à favoriser l’épanouissement de chacun. Cette cohérence du regard caractérise l’écologie humaine ».
Le concept ainsi éclairé, reste à savoir comment agir dans l’esprit de l’écologie humaine. L’un des initiateurs du Courant propose une grille de lecture en six critères qui peut valoir aussi pour l’appréciation des programmes de nos futurs candidats à la magistrature suprême : partir de la personne, ce qui suppose d’avoir une expérience concrète des choses que l’on prétend conduire, agir pour le bien commun, c’est-à-dire dépasser les intérêts catégoriels, appliquer le principe de subsidiarité, en ne faisant à son niveau que ce qui ne peut pas l’être mieux à un niveau inférieur, se déployer avec prudence, vertu qui permet de déjouer les pièges des bonnes intentions, choisir la solidarité, dans le souci de la commune famille humaine et expérimenter, en faisant le choix de l’audace créatrice.
Dès lors, l’écologie humaine invite à porter un regard à 360° sur la société mais unifié par trois principes sur lesquels bâtir la maison commune. Tout d’abord être bienveillant, en observant le milieu social et naturel avec la conviction que la capacité au bien est ancrée dans la condition de l’Homme au même titre que la raison, en s’abstenant de tous clivages fondés sur des jugements de valeurs, de classes ou de catégories. Ensuite, reconnaître nos « communs », c’est-à-dire discerner ce qui nous est commun et qui nécessite, de ce fait, que nous en prenions soin ensemble. Cette perception en appelle à la responsabilité de chacun pour la gérance de ce qui nous est commun, à commencer par la nature qui constitue notre milieu de vie, et invite au déploiement de formes intermédiaires de communautés responsables capables de s’articuler avec l’État et le marché. Enfin, agir à partir du plus vulnérable, ce qui conduit à désavouer les politiques qui se placent à des niveaux abstraits, surévaluant les capacités humaines et rêvant d’hommes parfaits. Pas plus que la nature qui ne peut donner plus qu’elle n’a, l’humanité ne peut être dépassée sans compromettre son propre fondement.
« Repenser ensemble une société à hauteur d’Homme » : finalement, l’écologie humaine est plus politique qu’elle n’y paraît.”