OUI : vous avez du talent ! #ReplayWebinar

23 Mai, 2022 | ÉDUCATION & ENSEIGNEMENT, SCIENCES

En replay, Xavier Cail, Directeur de PLEINS TALENTS et du réseau TALENTS & TRAJECTOIRES, qui a approfondi la notion de talentcette ressource naturelle dont nous avons tous été pourvus et qu’il nous faut découvrir – lors d’une conférence en ligne organisée en mai 2022.

“Nous avons de multiples talents qui procèdent le plus souvent d’un même élan de vie.

Quand surgit la question des talents

Xavier Cail : “Pour moi, la question des talents a émergé suite à une observation. De fait, en accompagnant les entreprises, j’ai découvert qu’un certain nombre de collaborateurs – qui exerçaient leur métier avec toutes les compétences nécessaires – travaillaient malgré tout dans une certaine frustration, voire une profonde insatisfaction. En parallèle, leurs employeurs en étaient insatisfaits. Étrange paradoxe : comment, malgré la maîtrise de toutes les compétences requises pour un poste, le travailleur peut-il se retrouver dans cet état de mal-être et d’inadéquation ?

Je me suis aperçu que dans 100 % des cas, ces personnes avaient appris un métier, des savoir-faire, mais elles ne s’exprimaient pas dans leur travail.

Talent : à découvrir

Suite à ces observations, j’ai fondé le réseau d’accompagnement Talents et Trajectoires. Et c’est grâce à cette expérience d’accompagnement que je peux aujourd’hui aborder cette question des talents.

Le talent n’est pas quelque chose d’acquis ou d’appris. Le talent se découvre. Il s’agit de quelque chose que nous aimons faire, qui nous semble facile et qui nous procure de la joie.

Je pense au film La famille Bélier, où la jeune fille découvre son talent vocal grâce à son professeur de musique. Je me rappelle aussi de cette personne qui racontait comment elle argumentait dans un débat : elle était parfaitement à l’aise et son argumentation était fluide. Pour elle, c’était naturel ; elle n’avait pas l’impression d’avoir un talent particulier. Or, c’est précisément cela, le talent : une habileté naturelle à réaliser des choses, à transformer son environnement, avec facilité, joie et succès. 

Les autres, ces révélateurs de talents

L’être humain n’a pas choisi de vivre : la vie lui a été donnée. Notre responsabilité est d’accueillir cette vie. C’est la même démarche avec les talents : on ne pourra pas les déployer si on ne les accueille pas préalablement.

Comme le talent est quelque chose de facile et naturel, ce sont ceux qui nous entourent qui nous aident à en prendre conscience. Une personne a d’ailleurs un rôle particulier dans la découverte des talents : le père. Les observations que nous faisons lors des accompagnements montrent que le premier élément de frein dans l’engagement de ses talents est la non-reconnaissance du père. C’est lui qui, plus que la mère, nous dit notre identité.

Selon Yannick Bonnet, quand une mère fait un compliment à son enfant, l’enfant pense maman me fait un compliment parce qu’elle m’aime. Quand le père fait le même compliment au même enfant, ce dernier se dit que si son père le lui dit, c’est que c’est vrai. Deux retours qui ont par ailleurs la même importance : j’ai autant besoin d’avoir des preuves d’amour et une confiance affective que des affirmations sur qui je suis, grâce à quoi je peux engager mes talents.

Bien sûr, nous pouvons trouver dans notre entourage d’autres paternités : il peut s’agir du retour d’un enseignant, d’autres personnes dans la famille, des patrons (homme ou femme). Et puis il y a aussi le retour de ceux qui accompagnent. Je dis cela aussi simplement parce que mon père est parti quand j’avais 3 mois, je n’ai donc pas bénéficié de cette confirmation du père. En revanche, j’ai bénéficié d’autres types de paternité.

Déployer ses talents

Pour déployer ses talents, il faut se confronter à des missions, des travaux, qui vont les solliciter.

Par exemple, un jeune qui est actuellement en stage chez nous, fait un DUT gestion des entreprises et des administrations (GEA). Or, je pense que c’est un grand créatif. Évidemment, il n’a pas choisi la formation la meilleure pour découvrir ses talents créatifs. Il serait dans une formation commerciale, communication, marketing ou artistique, que le terrain serait peut-être plus favorable pour que ses talents lui soient révélés. 

Bonne nouvelle : plus on déploie son talent, plus on a de ressources pour le déployer. Plus on le sollicite, plus on en voit l’immensité. Le talent ne se tarit pas ; on peut tous en faire l’expérience. C’est donc une ressource tout à fait écologique sur laquelle on ferait bien de s’appuyer davantage !

Et puis, les talents s’étoffent. La découverte de ses talents n’est jamais terminée. C’est quelque chose qui nous réjouit. Faut-il encore qu’il y ait les conditions pour le faire…

Itinéraire d’un talent comblé

Nous pouvons passer par des phases de doutes, partir dans de mauvaises directions. Je pense à ce quadragénaire qui a été commercial toute sa vie. En travaillant ensemble sur ses talents, on a découvert qu’il avait un vrai talent de réflexion et de rigueur analytique, idéal en amont de la pratique terrain. Sa fonction de commercial avait toujours été compliquée pour lui…
Aujourd’hui, il anime des formations en management. Il a retrouvé le plaisir de la conception d’une pédagogie et celui de transmettre.

Il n’y a pas d’âge pour trouver sa voie. J’encourage tous ceux qui se posent la question de leur voie de se faire accompagner sur cette question. Il peut y avoir un avant et un après. Il n’est jamais trop tard pour prendre un virage. C’est une autre façon de dire qu’il n’est jamais trop tard pour être heureux !

Les fruits de la découverte de ses talents 

Je me souviens de cette entreprise de textile que j’avais accompagnée. Ce qui m’a énormément surpris, c’est qu’il y avait une dizaine d’indicateurs au rouge : rentabilité, absentéisme, mabiance générale, etc. Or, quand les relations dans l’entreprise ont été réajustées, tous les indicateurs sont progressivement passés au vert, naturellement. C’est pareil avec les talents : plus on agit dans ses talents, plus les fruits en découlent.

  • La joie. On est heureux de déployer ses talents, de s’exprimer. Nous ne faisons plus quelque chose qui est extérieur à nous, nous transformons notre environnement en exprimant qui nous sommes.
  • La confiance en soi. C’est effarant de voir à quel point nous perdons confiance en nous. Quand je prends conscience de mes talents, je prends conscience de ce qui est bon en moi.
  • L‘enthousiasme. Sentir que l’on est heureux de s’exprimer donne beaucoup d’énergie ; c’est fécond, performant, ça fonctionne bien. Même les autres vous le disent !
  • L‘audace. Aujourd’hui, nous avons besoin de personnes qui sont dans leur talent, pour avoir l’audace d’exprimer et de donner aux autres qui elles sont. Je pense que c’est le plus beau cadeau qu’on puisse faire au monde, mais pour ce faire, il faut prendre confiance dans ses talents. 

Et les compétences dans tout ça ?

La compétence est importante. Il est impossible de travailler sans compétences.

Et quand la compétence – donc le savoir-faire – est le fruit de vos talents, vous êtes alors dans un accomplissement de vous-même. C’est merveilleux parce qu’à la fois, vous êtes heureux et les autres bénéficient des fruits de votre talentueux travail.

Mais quand vous avez développé des compétences extérieures à vos talents, vous ne vous exprimez pas en déployant ces compétences. Vous êtres frustré et ne donnez pas le meilleur de vous-même. Et progressivement, vous vous détruisez à petit feu. Finalement, la question est : est-ce que je vais vers la vie ou vers la mort ? Développer des compétences à partir de ses talents, est un chemin de vie.” 

découvrir ses talents

Vos questions / remarques à la fin du webinar

Quel est le lien entre talent et vocation ? 

Xavier Cail : “Il faut prendre le terme de vocation dans son étymologie latine vocare, “appeler”. On se sent “appelé à”. Je pense que quand on est effectivement dans ses talents, on a conscience de ressources naturelles que nous avons et pour cette raison, on se sent appelé à. Je me sens tout à fait appelé à accompagner des personnes sur la question du travail, parce que j’ai pu identifier les talents qui me permettent de le faire. Je crois qu’on peut dire que si chacun était à sa place dans ce monde, on s’apporterait beaucoup plus. Finalement, dans le monde dans lequel nous sommes, notre difficulté est de coopérer, de nous apporter mutuellement.” 

Un talent peut-il être “exploité” dans des domaines variés ? 

Xavier Cail : “Je vais prendre un exemple très facile et concret. Vous avez des personnes qui ont un talent naturel pour emmener les autres dans un nouveau projet. Je pense à une personne qui a travaillé dans le domaine de l’architecture. Elle était amenée à convaincre ses clients et ses partenaires, sur de nouveaux projets d’architecture. Elle a souhaité quitter le domaine de l’architecture. Aujourd’hui, elle accompagne dans notre réseau des personnes sur le chemin de leur voie professionnelle. Ce talent de donner envie, d’entraîner l’autre dans un projet qui lui correspond, elle le retrouve dans ce métier qui n’a rien à voir avec le métier d’architecture.

Autre exemple, toujours dans notre réseau, de quelqu’un qui a un vrai talent de “réparateur”. Il a travaillé dans l’industrie, notamment à penser la conception et maintenance de machines. Il a des talents de bricolage tout à fait impressionnants, il est capable de réparer tout ce qui est cassé. Chez nous, il accompagne la personne dans la restauration de ses talents et de sa vocation professionnelle. Entre ce qu’il faisait dans l’industrie, ce qu’il fait chez lui en bricolage et ce qu’il fait chez nous, on pourrait dire que ça n’a rien à voir. Pourtant il y a bien un élan de vie, de transformation, qui est commun à tous ces talents qu’il a développé.”

Plus j’avance, plus je comprends qu’il y a quelque chose qui nous oriente en nous. Non pas vers un métier, mais vers un certain type de travaux, de métiers. Nous avons de multiples talents qui procèdent le plus souvent d’un même élan de vie. C’est le constat que je fais. On n’aura jamais fini de découvrir l’ensemble de nos talents à partir de ce que nous sommes, de cet élan de vie qui est en nous.” 


Comment vous faites pour découvrir les talents ? Avez-vous des outils ?

Xavier Cail : “Ce n’est ni simple ni facile d’identifier les talents. Nous faisons un premier travail qui est d’aider la personne à faire une relecture de ses réalisations. Le talent s’exprime quand nous réalisons quelque chose. On demande à la personne de choisir les réalisations aimées, plutôt facile et réussies. La personne est amenée à décrire ces réalisations, à nous dire ce qu’elle a aimé, pourquoi et comment elle a procédé. Lorsqu’on fait ce travail, qui demande beaucoup de rigueur, on arrive à comprendre les talents de la personne. On complète ce travail par un outil appelé L’analyse de la personnalité professionnelle, qui a une base anthropologique – donc psychologique – et permet d’identifier les prédispositions innées. C’est un outil qui nous aide grandement mais on pourrait tout à fait s’en passer parce que le talent est une chose que chacun d’entre nous exerçons toujours dans un certain nombre de situations. Il faut repérer ces situations où l’on est heureux, où c’est facile et où ça a fonctionné.”

Comment discerner si j’ai vraiment tel talent ou si je crois l’avoir ? 

Xavier Cail : “Il faut poser la question de ce qui a déclenché notre action. Ici, la reconnaissance est très importante. Hier, un jeune a animé toute une soirée ; il s’est ensuite senti en pleine forme. Premier signe important ! Et puis, ça lui a semblé plutôt facile. Quant à savoir si cela a été apprécié… Je lui ai proposé d’aller demander aux participants. Qu’avez-vous perçu dans ce que j’ai fais ? Qu’avez-vous retenu ? Qu’ai-je apporté de spécifique dans l’animation de cette soirée ? Parce que vous allez prendre 10 animateurs différents, les 10 vont apporter quelque chose de singulier. Il faut avoir cette simplicité, cette humilité d’aller demander. Quelques fois, nous faisons cet exercice avec les personnes qu’on accompagne. On leur dit d’aller demander à leur entourage professionnel, familial, amical ce qu’elles apportent dans la relation. Voilà un exercice simple. Vous ne le dites pas oralement, vous l’écrivez. C’est impressionnant de voir la convergence des retours.”

Faut-il avoir un talent pour aider les autres à découvrir leur talent ? 

Xavier Cail : “Un point que je n’ai pas abordé est la question du désir chez l’être humain. Le talent, si je simplifie, est une habileté naturelle. Mais il y a toute la question du désir et du sens qui rentrent également en compte. Il y a des sujets qui m’animent et d’autres pas. Ce n’est pas parce qu’on est un bon analyste qu’on est fait pour faire toutes les analyses. Einstein était passionné par le cosmos, c’est son sujet. Mais il y a des tas d’autres sujets qui ne l’intéressaient pas. Il est important de sentir quelles sont les questions du monde qui m’animent.

Pour exercer ce métier chez Talents & Trajectoires, il faut avoir des talents qui vont donner un minimum d’analyse, apporter un minimum de capacité à entrainer l’autre, guider, etc. Mais il faut d’abord être mobilisé par cette question de l’Homme dans le travail. Moi, c’est une question qui n’anime depuis que j’ai 20 ans.”

Comment concilier son talent et la question des ressources financières ? J’ai peur que mon talent devienne un travail comme un autre et d’en perdre l’enthousiasme… 

Xavier Cail : “Vos peurs sont légitimes. On les rencontre chez les 3/4 des personnes que l’on rencontre. Je vous garantis que quand vous êtes dans vos talents, au service d’un sujet, d’une question, qui vous anime, vous ne vous ennuyez pas.

La peur du manque de ressources financières est extrêmement fréquente aujourd’hui. Elle se pose chez tout le monde. Le constat que nous faisons est que si nous mettons la question financière en début de réflexion, nous sommes sûrs de ne pas arriver au bout.

Je me rappelle de cette femme ; quand je lui ai fait un retour sur ses talents, elle a très vite vu que c’était des talents qui allaient avec la dimension créative et artistique. Elle m’a répondu : je ne veux pas être artiste, il faut que je vive de mon travail. Je lui ai répondu que ses talents pouvaient s’exprimer dans plein d’autres domaines. Mais j’ai évacué la question financière au début, pour la mettre à la fin. Et on a avancé avec cette personne. Aujourd’hui, elle est conteuse !

La question financière est bien réelle mais le conseil que je vous donne par expérience, est de la mettre à la fin et travailler sur ce qui vous anime. Ce sont de justes peur mais que l’on peut dépasser.”


J’ai identifié mes talents mais sans diplôme dans le domaine, comment être crédible pour trouver un travail ? Est-il possible de dépasser ce frein ?

Xavier Cail : “Encore une bonne nouvelle : oui on peut dépasser ça. J’entends ce que vous dites, je l’observe sur le terrain, bien sûr. Néanmoins, nous nous laissons enfermer par ces pensées. Imaginez un professionnel qui rencontre une personne qui a de l’enthousiasme pour ce qu’elle veut faire et qui a déjà commencé à expérimenter dans sa vie personnelle, auprès d’amis, de la famille, etc. Je vous garantis que ça le touche.

Vous, dans ce qui vous anime, dans vos talents, vous avez tout à fait la capacité de transmettre votre enthousiasme à votre interlocuteur. Lui, va avoir envie de vous aider, c’est-à-dire de vous mettre en relation avec d’autres personnes de ce monde professionnel. On se fiche du diplôme, à moins de vouloir être médecin, etc. Il faut avoir cette audace d’aller parler de ce qui vous anime, d’aller rencontrer des professionnels.” 


À partir de quel âge peut-on faire un bilan de ses talents dans votre réseau ? Est-il finançable par mon compte formation ?

Xavier Cail : “À partir du moment où le jeune se retourne vers le monde extérieur. Généralement, jusqu’à une douzaine d’années, il est tourné vers l’intérieur, vers la famille. Puis à un moment donné, il commence à s’intéresser au monde qu’il l’entoure. C’est là où le père prend un rôle singulier. Ce monde, d’ailleurs, lui fait peur et en même temps l’attire. Il a envie, comme tout être humain, d’être utile dans ce monde. L’être humain est fait pour ça, apporter sa pierre à l’édifice. À partir du moment où l’enfant se retourne vers ce monde extérieur plein de sollicitations, on peut démarrer un travail avec lui. On a l’habitude de dire que c’est à l’âge du lycée, mais il y a des jeunes en troisième qui ont déjà la maturité nécessaire. La question n’est pas d’abord de savoir ce qu’il vont faire comme métier demain – même si la question est posée – mais d’abord, pour eux, de prendre confiance dans ce qu’ils sont, dans leur identité, dans leur capacité, dans leurs talents, etc. 

Oui le bilan de compétences est considéré comme une action de formation. À ce titre, il est finançable via la plateforme du CPF.


Quel est votre parcours Xavier Cail ? 

Xavier Cail : “Mon parcours est lui-même une expérience qui parle des talents. J’ai fait de la philosophie réaliste, à partir de l’observation du réel. Puis une formation en communication, puis en gestion des ressources humaines. J’ai ensuite travaillé dans la grande distribution, en tant que chef de caisse chez Auchan. Ca m’a absolument passionné. Je me suis demandé comment il était possible, en sortant de philo, d’être aussi à l’aise dans le concret ! Après la grande distribution, j’ai été dans la métallurgie pour m’occuper de communication. Puis,j’ai été amené, suite à un plan social, à entrer dans le métier de l‘outplacement : aider les personnes à retrouver un emploi. J’ai beaucoup aimé. J’ai ensuite créé une structure en Picardie, destinée à aider les personnes le souhaitant, sur la question de leur travail. J’ai monté un des centres, dans le cadre d’une association. Je l’ai développé pendant 7 ans, puis, j’ai créé le cabinet Pleins Talents.

Je crois qu’on ne crée pas une entreprise par hasard ; c’est toujours un chemin de vie. Mes différentes expériences professionnelles, où j’étais plus ou moins à l’aise, m’ont permis de découvrir mes ressources, moi qui n’avais aucune confiance en moi.”

Vos commentaires, en fin de webinar : 

  • Sylvie : Clarifiant et essentiel, merci infiniment ! 
  • Inès : merci pour ce bel échange!
  • Anne : Merci, c’était passionnant !

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