FERUS : fluidifier la cohabitation entre humains et grands carnivores

3 Mar 2025 ENVIRONNEMENT NATURE & ENVIRONNEMENT

Fannie Malet est coordinatrice des actions sur le terrain chez FERUS, une association de protection des grands prédateurs – ours, loups et lynx – en France. Elle pilote notamment le projet PastoraLoup dans les Alpes pour faire cohabiter sereinement éleveurs et loups. Focus sur une initiative qui prône le respect de tout le vivant.

FERUS : l’histoire d’une initiative en faveur du vivant

Fannie Malet, coordinatrice des actions sur le terrain chez FERUS : “L’association FERUS (« ce qui est sauvage » en latin) est né en 2003 de la fusion d’ARTUS (association née en 1989 militant pour la sauvegarde de l’ours brun) et du Groupe Loup France (association née en 1993 avec l’apparition des premiers loups sur le territoire français).

De là, l’objet de l’association est devenu la protection des trois grands prédateurs qui réapparaissent sur le territoire français : ours, loups et lynx. Elle s’investie pour faciliter la coexistence entre ces grands carnivores et les activités humaines, tout spécifiquement avec le pastoralisme.

FERUS compte aujourd’hui 5 salariés et peut s’appuyer sur l’engagement de nombreux bénévoles tant pour ses actions de terrain au quotidien que pour l’animation des réseaux locaux.

Focus sur le loup : une coexistence avec les hommes possible ?

Si certains voient le retour du loup sur le territoire français comme un symbole de nature sauvage retrouvée, d’autres, notamment les éleveurs, le perçoivent comme une menace pour leurs activités.

De fait, malgré la présence de plus d’un millier de bêtes dans l’Hexagone, sa présence pose des défis majeurs aux éleveurs, notamment en raison des attaques sur les troupeaux. En 2022, 11616 morts de bêtes imputées aux loups ont été recensées en France, presque deux fois plus qu’en 2012 (en revanche, aucune attaque vis-à-vis de l’homme est à déplorer depuis près de 140 ans).

Face à constat, FERUS propose des solutions qui protègent les troupeaux et créent de magnifiques liens entre humains : le projet PastoraLoup.

Le programme PastoraLoup

PastoraLoup est un programme d’éco-bénévolat porté par l’association FERUS depuis 1999 pour favoriser une coexistence harmonieuse entre éleveurs et grands prédateurs.

Ce programme de soutien des éleveurs en zone à loups propose différentes actions dans les zones impactées : Alpes et massifs provençaux, PACA, Rhône-Alpes, Jura, Bretagne et Lot, aujourd’hui..

Dans les Alpes, d’où est originaire le programme, PastoraLoup propose le renforcement de la présence humaine auprès des troupeaux, qui est l’une des mesures les plus efficaces face à la prédation.

Nos bénévoles vont prendre la relève de la surveillance pendant la nuit : quand le berger ramène son troupeau à la “couchade”, le bénévole prend le relais et bivouaque autour du parc de nuit, assurant des rondes régulières pour mettre les éventuels loups en fuite.
Il peut également y avoir un renforcement de présence en journée, ce qui permet au berger de se ravitailler, de prendre soin de certaines brebis, etc.

On peut également donner des coups de main pour des chantiers d’aménagements pastoraux : parc de nuit renforcé, entretien des parcs…

Ce programme prouve qu’il est possible de protéger la biodiversité tout en répondant aux enjeux de la cohabitation entre la faune sauvage et l’élevage pastoral, avec une baisse notable du stress chez les éleveurs accompagnés, une mobilisation citoyenne accrue et un impact concret sur la prévention des prédations. Sans compter que cela créé du dialogue, une meilleure connaissance des problématiques de chacun et des amitiés indéfectibles !

Un Plan National – Solution Miracle ?

Suite aux plaintes des agriculteurs, l’État à décidé de mettre en place un projet à échelle nationale pour mieux s’adapter à la présence de plus en plus importante de ces canidés. Le Plan National Loup, établi en février 2024, permettra non seulement de poursuivre la protection de l’espèce, mais aussi de mieux accompagner la profession agricole face à la menace de la prédation.  Ce projet tente d’apporter des solutions avec trois volets principaux :

  • L’indemnisation des pertes et dommages subis par les éleveurs.
  • Le financement de moyens de protection, tels que des chiens de garde et clôtures renforcées.
  • Les tirs de prélèvement, qui visent à limiter la population lupine lorsqu’elle devient trop problématique, bien que cette mesure soit vivement critiquée par les associations de protection de la faune, dont FERUS.

FERUS : anticiper plutôt que subir

Pour FERUS, la clé d’une meilleure coexistence repose sur l’anticipation. L’association estime que les éleveurs devraient se préparer pour faire face à l’augmentation de la population lupine, et être soutenus plus en amont afin de mettre en place des protections efficaces avant l’apparition du loup sur leurs terres. C’est notamment ce que permet le diagnostic de vulnérabilité, financé par l’État, qui aide chaque exploitation à identifier ses points faibles face aux attaques.

Une question de société…

Si la présence du loup en France est un fait, sa gestion demeure un sujet sensible. La coexistence est possible, mais elle demande des adaptations, du dialogue et un engagement de tous les acteurs concernés.

FERUS insiste sur l’importance d’informer et de sensibiliser le grand public, notamment à travers ses actions locales et son plaidoyer contre le déclassement du loup, qui pourrait ouvrir la porte à davantage de tirs.

Face à ces enjeux, l’association appelle chacun à se mobiliser pour une cohabitation plus apaisée entre le monde pastoral et la faune sauvage. Car le loup, au-delà des clivages, fait partie intégrante de notre patrimoine naturel depuis des millénaires.”


Accéder au site de FERUS : ferus.fr

Pour aller plus loin sur le sujet, découvrez l’intervention de l’écologue Vincent Vignon : Les grands prédateurs en France métropolitaine : état des lieux et perspectives 

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