La conquête de Nina, sorti mi-juillet 2021 aux éditions Semeur de mots, emmène dans un monde poétique et imaginaire, joliment illustré par Eloise Morandi. Sophie Agapi, l’auteur de ce livre, raconte l’origine du projet qui s’adresse aussi bien aux adultes qu’au jeune public.
“(…) Mais le mot de la fin
La conquête de Nina vu par François Cheng de l’Académie française
C’est quand même le mot amour
Quand on le retrouve, on est sauvé.
Car aimer, c’est aimanter,
C’est attirer tous les mots bons et beaux
Comme un aimant.
Redire le mot amour
C’est retrouver tous les êtres aimés
Pour ne plus les oublier.”
La conquête de Nina : bien plus qu’un livre… pouvez-vous nous en dire plus ?
Sophie Agapi : “Ce livre c’est d’abord l’histoire d’une petite fille, Nina, qui part à la conquête des mots perdus par son grand-père. C’est le récit d’une grande aventure durant laquelle Nina croise plusieurs personnages qui vont la faire réfléchir sur la place des mots, du langage, dans nos vies.
La conquête de Nina, c’est un croisement entre poésie, théâtre, conte philosophique et univers graphique. Le livre est entièrement illustré par Eloise Morandi, une artiste Britano-italienne, créatrice d’un personnage très poétique nommé « Nina ». C’est aussi une pièce de théâtre qui prendra, je l’espère, vie à travers des représentations théâtrales ou des lectures. C’est un texte qui s’écoute, j’ai beaucoup travaillé la sonorité, le rythme propre à une écriture dramaturgique.
Enfin, c’est bien plus qu’un livre car je souhaite que La conquête de Nina soit l’occasion de découvrir des personnes incarnant dans leur travail ou leurs initiatives, les valeurs suggérées par le texte : l’éducation au langage, le développement des liens intergénérationnels et bien d’autres sujets encore. C’est le but des vidéos des « ambassadeurs officiels » présentées sur le site internet… d’autres témoignages s’ajouteront au fur et à mesure. J’espère aussi que ce livre suscitera des actions, petites ou grandes, pour un monde plus humain. L’avenir nous le dira…”
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans ce projet ?
S. A. : “Agir pour la beauté, la vérité et l’amour… c’est tout le sens de La conquête de Nina et c’est ce qui m’a stimulé en travaillant sur ce projet. Nina, grâce à sa force, sa générosité et sa douceur, fait grandir, à son niveau, l’humanité. C’est le désir de partager cette conviction profonde qui m’a poussé à me lancer dans cette aventure : l’efficacité humaine tire sa source dans l’amour. C’est ce qui donne du sens à toutes nos actions. J’ai toujours été frappée de voir l’impact social que peut exercer une seule personne lorsqu’elle incarne cela dans son travail ou dans sa vie de famille. Vouloir transmettre ce message a été un moteur essentiel et libérateur pour moi, dans un monde parfois assoiffé de cette vérité si « ordinaire » et pourtant si révolutionnaire.
Ressentir cette incapacité à trouver les mots justes, vouloir s’exprimer sans les trouver… Voilà ce qui m’a également incité à écrire. J’ai mis en scène un grand-père qui perd les mots : cette absence est commune à ceux qui n’ont pas reçu l’amour des lettres et également à ceux qui ont subi un traumatisme… C’est d’ailleurs souvent une source de violence ou de repli. J’ai donc souhaité mettre en avant l’importance de la culture dans la construction de soi et la beauté de la transmission, notamment à travers les liens intergénérationnels.
Enfin, autre motivation : observer, analyser le monde qui nous entoure, dénoncer de manière positive, simple et humoristique quelques travers de notre société contemporaine – notre rapport aux mots reflète très bien certaines réalités. J’avais tout simplement besoin de l’exprimer, étant moi-même parfois confrontée à une perte de sens dans mon travail, soumis à une logique de rentabilité. L’élément déclencheur a été le jour où mon directeur, pour gagner du temps, s’est mis à désigner certains de ses employés par leurs initiales.”
Pourquoi s’intéresser au verbe, aux mots, à la parole ? Et à la perte de tout cela…
S. A. : “Les mots sont d’abord le pont qui nous relie aux autres – comme en témoigne la relation entre Nina et son grand-père. Mais ce texte traite d’une expérience universelle : la perte des mots avec cette note d’espoir qui montre que, même lorsque les mots s’absentent, demeure pour toujours l’invisible flamme. Je pense notamment aux familles touchées par un proche atteint par la maladie d’Alzheimer ou d’autres maladies apparentées. Je n’étais absolument pas concernée par cela tout au long du projet, et étrangement au moment de la sortie du livre, je le suis désormais au sein de ma famille. Pour être sincère, cette concordance est assez troublante…
C’est également une parabole sur le pouvoir des mots – qui peuvent être soit instrumentalisés à des fins malhonnêtes soit être au service de la vérité et de l’amour.”
Qu’est-ce que ce projet vous a apporté ?
S. A. : “La persévérance, puisqu’il y a eu de nombreux obstacles à affronter. J’ai ainsi appris à m’adapter à la temporalité du projet, à attendre de longs mois, voire années, avant de rencontrer la bonne personne pour avancer d’un pas. Cette aventure a été une vraie conquête – il me fallait appliquer moi-même ce que j’admirais chez Nina : sa détermination.
Un projet se réalise rarement seul, c’est grâce à l’amitié et à la confiance de nombreuses personnes rencontrées que j’ai pu avancer. Dans les moments de doute, voire parfois de peur face à l’échec, les amis et mes proches croyaient pour moi.
J’ai aussi été rassurée de voir que le texte avait été remarqué au Grand Concours de théâtre contemporain francophone, qu’il avait été lu par des comédiens… et bien accueilli par François Cheng ! J’ai donc tout simplement aussi appris à faire confiance. Il suffit parfois de rêver pour donner des ailes à nos actions. Monter un tel projet, a été une succession d’expériences enrichissantes à commencer par les rencontres suscitées et en cela je n’ai pas perdu mon temps. J’ai d’ailleurs ainsi pu découvrir le Courant pour une écologie humaine que je ne connaissais pas.”
Qu’est-ce que vous pensez que ce livre va apporter à ses lecteurs ?
S. A. : “J’espère que ce livre sera l’occasion pour les lecteurs de s’évader un peu, de lire en souriant et de nourrir leur cœur avec de la beauté, notamment à travers les magnifiques illustrations.
Enfin, pour répondre à cette question, je préfère répéter ce que disent les lecteurs eux-mêmes après la lecture du livre :
« Facile à lire, joyeux et chantant, ce livre peut réjouir et rejoindre les grands et les petits, les compliqués et les simples, faire sourire les tristes, égayer les anxieux, et charmer les paisibles… »
« La conquête de Nina apporte sur la souffrance et l’angoisse, vécues par tant de personnes et de familles aujourd’hui, un baume de fraîcheur, de douceur, de consolation, de vie. C’est une transfiguration de la souffrance par la poésie. »”
Et donc, vous avez envoyé votrelivre à François Cheng, de l’Académie française !
S. A. : “J’ai effectivement envoyé le manuscrit à François Cheng et il a eu la gentillesse de me répondre en m’écrivant quelques vers qui sont la clé de lecture du texte. Il m’a dit qu’il trouvait le texte « inspiré ». Ce fut un vrai cadeau de recevoir une lettre de cet académicien pour qui j’ai beaucoup d’admiration, tant pour ses écrits que pour sa grande humanité. Je viens juste de lui envoyer le livre, j’espère qu’il appréciera.”
Un dernier mot ?
S. A. : “Si vous aimez « La conquête de Nina », parlez-en autour de vous… les lecteurs sont les meilleurs ambassadeurs. C’est simple, court à lire et agréable à regarder. Sous forme de carnet, vous pouvez l’emporter facilement avec vous. Je vous souhaite donc bon voyage en compagnie de Nina !”
Pour en savoir plus : https://www.semeurdemots.fr