La figure du Roi

14 Jan, 2018 | POLITIQUE

Le Prince François d’Orléans, Comte de Clermont, est décédé le 31 décembre dernier à l’âge de 56 ans et a été inhumé le 6 janvier dans la Chapelle royale de Dreux, nécropole de la Famille d’Orléans. A la suite d’une toxoplasmose qui l’avait rendu handicapé à vie, le Prince s’était retrouvé, malgré lui, au cours de l’année 2016, au cœur d’un conflit familial et dynastique qui, au-delà des personnes en cause, posait une question de fond qui reste d’actualité.
Chronique de Fabrice de Chanceuil, journaliste indépendant.

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En effet, le 18 mai de cette année-là, dans un document rendu public, le Prince Henri d’Orléans, Comte de Paris, Chef de la Maison de France, avait rétabli son fils aîné dans ses droits dynastiques de Dauphin de France et avait nommé son fils cadet, Jean d’Orléans, Duc de Vendôme, régent de son frère, contrevenant ainsi à une décision prise le 25 septembre 1981 par son père, le Prince Henri d’Orléans, Comte de Paris (1911-1999) qui, tirant les conséquences du handicap de son petit-fils, avait transféré ses droits à son frère venant après lui dans l’ordre de primogéniture.

Ce revirement avait entraîné, le 1er août 2016, une réaction hostile du Prince Jean d’Orléans qui avait publié un communiqué indiquant qu’il refusait de voir remise en cause la décision de son grand-père sur la non successibilité de son frère aîné, réaction qui avait entraîné le 20 août suivant celle de son père dont le secrétariat confirmait les dispositions prises par celui-ci par testament en précisant que nul n’ayant le pouvoir de modifier l’ordre dynastique, le Prince François sera « le Roi virtuel et son frère puîné Jean, le Régent réel ».

Au-delà de la querelle dynastique, la question soulevée était celle de la conception de la « figure du Roi » telle que l’avait posée un an plus tôt Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie, dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Le 1 : « La démocratie comporte toujours une forme d’incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même (…) il y a un processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du Roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n’a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le Roi n’est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d’y placer d’autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l’espace. On le voit bien avec l’interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du Général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu’on attend du Président de la République, c’est qu’il occupe cette fonction. Tout s’est construit sur ce malentendu ».

Monarchie ou république, quelle image doit renvoyer la « figure du Roi » ? Depuis qu’il a été élu Président de la République, Emmanuel Macron en a donné sa propre définition qui conduit les observateurs à le qualifier de Président « jupitérien », détenteur de la toute puissance. Par sa décision, le Prince Henri voulait donner une autre vision en voulant conférer à une figure faible et fragile le droit de représenter la Nation même si le Duc de Vendôme n’avait pas tort en voulant protéger son frère d’un débat qui le dépassait en affirmant qu’il ferait pour qu’on le laisse en paix et qu’on ne l’utilise pas.

En fait, la question n’est effectivement pas celle de l’exercice du pouvoir mais de l’incarnation de celui-ci, qui est au cœur de la notion de la « figure du Roi ». Quel symbole celle-ci doit elle porter et quelle image doit-elle renvoyer à ceux qui la regardent ? Tout pouvoir veut signifier la force mais le contraire de celle-ci est la faiblesse et non la fragilité. Cette dernière est le propre de notre nature humaine et le reconnaître au plus haut sommet de l’État ne serait pas un aveu de faiblesse mais au contraire l’affirmation d’une force, celle de la dignité humaine qui dépasse les situations particulières et confèrent à tous des droits inaliénables.

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Source de l’image : l’écho républicain

 

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