La troisième table ronde des rencontres du travail, organisées le samedi 2 décembre 2017 à Toulouse, portait sur le thème : « Au-delà des relations marchandes, le travail au service de tous les hommes ». Avec Henri Mialocq, psychologue et psychanalyste, Bruno Fieux, ex PDG bénévole d’une société de financement solidaire, Initiatives pour une Économie Solidaire (IéS), Erik Pillet, Directeur de l’Arche en pays toulousain.
LE TRAVAIL NON MARCHAND
Le secteur associatif représente 60 milliards d’euros, 17 millions de bénévoles, 1.8 million de salariés et 1.3 millions d’associations réparties sur tout le territoire en France. 35 % des français de plus de 65 ans sont bénévoles. Avec l’allongement de la durée de vie, ces personnes sont devenues une force de travail considérable. La matrice associative est en train de remodeler le lien social lui-même.
PRÉSENTATION DES INTERVENANTS
« Le bénévolat : une pause pour se découvrir et découvrir son travail différemment »
Henri Mialocq, psychologue et psychanalyste : « Il faut faire une distinction entre ce que l’on est (= le sujet) et ce que l’on fait (= l’objet). L’individu s’accomplit dans son emploi car il y fait valoir des compétences mais si cet accomplissement est permis, c’est aussi parce qu’il prend le temps de marquer des pauses dans sa vie professionnelle quotidienne. Ces pauses consistent souvent à consacrer du temps au secteur bénévole ; elles marquent une parenthèse permettant à la personne de se découvrir sous un angle différent et de retourner à son travail de manière plus sereine. Dans le milieu bénévole, la dimension communicationnelle est très importante, le dialogue est primordial tant quand les choses vont mal que quand elles vont bien. Cette dimension communicationnelle est moins présente en entreprise. Là, l’implication bénévole peut aider au travail. »
« Être créateur d’une entreprise et avoir un handicap n’est pas antinomique »
Bruno Fieux, ex PDG bénévole d’IéS : « Une des caractéristiques importante du bénévolat est la place de l’homme. L’économie sociale et solidaire (ESS) créée deux fois plus d’emploi que l’économie classique et représente quand même 10 à 12 % de l’activité en France. Quand je suis rentré à IéS, c’était d’abord une bande d’amis, trois salariés et 150 bénévoles. Les relations entretenues avec les entreprises sont très cordiales, profondes. Dans un monde concurrentiel et capitaliste, valoriser l’inter-coopération, ce n’est pas souvent le cas. On a financé une société de taxis un peu particulière, Ulysse, spécialisée dans le transport de personnes à mobilité réduite. Il y a vingt ans, il y avait trois chauffeurs, aujourd’hui, il y en a 110 ! Christophe Scudier, fondateur de cette entreprise, est aveugle. Être créateur d’une entreprise et avoir un handicap n’est pas antinomique, au contraire, et c’est important de le rappeler. On a fêté l’an dernier la centième entreprise financée et le millième actionnaire de la coopérative. »
« Travailler et vivre avec des personnes en situation de handicap mental »
Erik Pillet, Directeur de l’Arche en pays toulousain : « J’ai fondé l’Arche en pays toulousain il y a une dizaine d’années. Nous sommes un établissement médico-social où sont accueillies une soixantaine de personnes adultes en situation de handicap mental. Nous avons aussi des maisons où vivent ensemble personnes handicapées et salariés ou jeunes en service civique qui ont fait le choix de s’engager une année, ou plus, au sein de notre association. Nous accueillons des personnes qui ne sont pas en mesure de travailler mais pour qui la dimension de travail est importante ; certains font trois rangs de tissage dans les activités artisanales et vont pouvoir se dire qu’elles ont travaillé. La reconnaissance et la valeur du travail effectué est importante. Nous développons d’autres activités : le maraîchage bio, un restaurant et un atelier de sous-traitance en relation avec les entreprises locales. On accueille aussi des séminaires d’entreprises. Ces professionnels côtoient donc les personnes handicapées et cette rencontre de deux mondes, qui peuvent paraître très éloignés, est porteuse de belles valeurs. »
MOTIVATION ET MANAGEMENT EN MILIEU ASSOCIATIF
B. F. : « Nous avons trois salariés… il est difficile de déterminer qui est plus impliqué ou motivé entre ces derniers et nos bénévoles ! C’est d’ailleurs une chose importante à garder en tête : ne pas surcharger de travail les bénévoles pour conserver intact leur motivation. »
E. P. : « Je pense qu’il est plus facile de tisser des relations de confiance dans le milieu non marchand et d’adhérer aux valeurs de ces structures dans lesquelles on devient bénévole. Cela permet une entente au sein de la structure plus cordiale et ainsi, en toute logique, un type de management différent de celui que l’on peut retrouver en entreprise. »
Cette dernière table ronde fini sur le message suivant : au lieu d’envoyer les managers en formation, il est tout autant bénéfique de leur faire faire un stage en milieu associatif… À méditer !
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