L’écologie humaine : passer d’un monde d’objets à un monde de relation

25 Sep, 2024 | WEBINAR

Dans un contexte où les enjeux écologiques prennent une place de plus en plus centrale, Le Courant pour une écologie humaine propose de repartir de l’Homme pour trouver des chemins de sortie de l’époque moderne. Jean-Philippe Lajambe, Président du Courant pour une écologie humaine (CEH), entre dans le détail.

Quelle est la spécificité de l’écologie humaine ?

Jean-Philippe Lajambe, Président du CEH : “Aujourd’hui, de nombreux acteurs – entreprises, États, associations et individus – ont pris conscience de l’importance de l’écologie et tentent d’apporter, à leur échelle, des réponses aux enjeux environnementaux. Mais les solutions proposées peinent à saisir la complexité des défis actuels et s’avèrent parfois contradictoires.
Dans ce contexte, l’écologie humaine se distingue et propose de repartir de la personne humaine pour réinventer notre rapport au monde.

Ses constats :

  • tout est lié – tout est délié – tout est à relier.
  • Si l’homme est responsable des déséquilibres écologiques, il en est également la première victime.
  • Nous sommes perdus sur le bon chemin.

L’écologie humaine cherche à comprendre comment nos actions – parfois prédatrices vis-à-vis de notre biosphère – affectent notre propre bien-être et nous coupent de la nature. Elle nous invite à reconsidérer notre manière de consommer, d’interagir avec notre environnement, de vivre avec le reste du vivant.

En abordant les problématiques sous différents angles – anthropologique, culturel, social – l’écologie humaine offre des clés de lecture nouvelles sur la complexité du monde. Et espère inspirer le plus grand nombre pour trouver des pistes d’exode de l’époque moderne.

Le monde qui vient est dans nos mains ! Nous en sommes responsables. Que voulons-nous mettre en place ? (Ce qu’on en dit nous ? Passer d’un monde d’objets à un monde de relations !)

Le CEH propose-t-il des critères pour définir le bien-fondé d’un projet ?

À la fin des années 1990, le premier président et co-initiateur du Courant pour une écologie humaine, Gilles Hériard Dubreuil, a participé à un projet européen du nom d’Ethos, qui avait pour but d’améliorer durablement les conditions de vie des habitants des villages Biélorusses dont la vie quotidienne avait été fortement affectée par la présence à long terme de contamination radioactive à la suite de l’accident de Tchernobyl. En creux, il a découvert ce qu’était les conditions d’une vie digne – au fond, tout ce qui manquait à ces populations à ce moment-là et qu’il fallait reconstruire. Il en est sorti 8 critères qui sont une magnifique grille de lecture pour tout type de projet.

  1. Respect des personnes : l’autonomie, la dignité et la vulnérabilité des personnes sont-elles respectées ? La capacité des personnes à décider et agir est-elle prise en compte comme une priorité par les institutions ?
  2. Contexte porteur : les personnes disposent-elles d’un environnement facilitant pour agir et répondre, concrètement, à leurs besoins essentiels ? (Nourriture, santé, sécurité, logement, éducation, travail, relations, transport, nature, loisirs, culture…
  3. Communautés de confiance : les personnes peuvent-elles agir avec les autres, pour proposer des solutions en commun ? Peut-on construire ensemble la confiance, à proximité ou à distance (par du  soutien) ?
  4. Enracinement territorial : les personnes et les communautés peuvent-elles vraiment vivre en relation avec leur environnement (naturel et social) et en bénéficier ? Appartenance à un territoire, convivialité sociale, accès à la nature et à ses ressources…,
  5. Écosystèmes protégés : il est possible de participer ensemble à la protection des écosystèmes naturels et culturels dans lesquels la vie se déploie, y compris dans le reste du monde et pour les générations futures.
  6. Information fiable : chacun peut-il accéder à l’information utile, vraie et crédible, pour s’orienter et construire du sens ? Peut-on bénéficier d’une pluralité d’expertises ?
  7. Soutien des institutions : Chacun peut-il bénéficier d’un soutien institutionnel efficace, fiable et juste ? Les personnes peuvent-elles peser sur les décisions publiques et contribuer à les orienter selon leurs besoins ?
  8. Sens et spiritualité : chacun, personnellement ou avec d’autres, peut-il mobiliser des ressources symboliques, spirituelles ou religieuses, notamment pour donner du sens à sa vie et aux événements traversés ?

En respectant ces critères, les projets peuvent, au fond, être labellisé “écologie humaine” car ils respectent le contexte nécessaire aux humains pour s’épanouir pleinement. Ces critères offrent une grille de lecture pour poser des choix éclairés et conscients, même à petite échelle.

La complexité des enjeux auxquels nous pouvons faire face aujourd’hui trouve une parfaite illustration dans la vente en supermarché français des tomates-cerises produites au Maroc, à un prix très bas. Ce phénomène, qui met en difficulté les producteurs bretons, notamment, est lié à des accords commerciaux entre l‘Union européenne et le Maroc où entre dans l’équation l’accueil de migrants climatiques… Rien n’est jamais aussi simple qu’il n’y parait.

Vous avez parlé de la form’action : pouvez-vous nous expliquer de quoi il retourne ?

La Form’action est effectivement un des outils du Courant pour une écologie humaine qui permet de se mettre concrètement en marche.

Après 5 années d’expérimentation sur le terrain et de maturation avec des centaines de personnes, cet outil a atteint sa forme actuelle : 15 réunions structurée en 3 grandes parties : ÊTRE – CROÎTRE – FRUCTIFIER.

Cette Form’action a pour sous-titre « vers une humanité intégrale » ; elle essaye d’approfondir une question primordiale : QUI est donc l’être humain ? Pour y répondre, elle croise 2 regards :

  • Le premier regard est “tout l’homme” : ce qui fait qu’une personne est un être humain, ce dont elle a besoin pour s’épanouir, se situer, s’enraciner, s’ouvrir, habiter, travailler, prendre soin et prendre sa place.
  • L’autre regard est “tous les hommes”, qui est la considération de notre place dans la grande famille humaine. Ce qui s’est passé avant notre arrivée sur cette planète – ce qui est nécessaire, aujourd’hui, pour construire une Société plus humaine, une société de bien commun. Les thèmes qui recouvrent ce « tous les hommes » sont les suivants : se recevoir, cultiver et garder, construire du sens, donner et échanger, construire l’unité, créer et transmettre. Et l’aboutissement de toutes ces soirées, la conclusion, c’est “choisir la vie”, qui est un thème éminemment politique auquel nous sommes confrontés quotidiennement dans nos existences.

Les 15 réunions se vivent en équipe – entre 5 et 8 participants. Cela permet d’approfondir des amitiés, de se rencontrer entre voisins, de dynamiser, ensemble, un immeuble, une rue, un quartier, d’être porté par une dynamique de groupe, tant dans les échanges que dans les actions proposées.

Une rencontre type dure 2h30 et commence par un moment de convivialité : un repas partagé, le visionnage d’une vidéo, qui dure à peu près 15 minutes, une étude de cas – les aventures d’Ékolu – qui permet de lancer une conversation dans l’équipe. Et ensuite, il est proposé une action concrète et adaptable localement.

Pouvez-vous témoigner de façon plus personnelle sur ce que le Courant pour une écologie humaine vous a apporté ?

Ce que j’apprécie le plus dans cet engagement, ce sont les rencontres enrichissantes et les échanges inspirants qui en résultent, faisant de mon parcours au sein du Courant une source de joie d’une richesse inestimable.”

Quelques références littéraires pour creuser la pensée du CEH (en vrac) :

  • Le travail invisible : Enquête sur une disparition, Pierre-Yves Gomez
  • L’esprit malin du capitalisme, Pierre-Yves Gomez
  • Le temps de l’Homme : pour une révolution de l’écologie humaine, Tugdual Derville
  • L’obsolescence de l’homme : sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution industrielle, Günther Anders
  • La fin des temps modernes, Romano Guardini
  • Découvrir un sens à sa vie grâce à la logothérapie, ViKtor Frankl
  • L’enracinement : prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain, Simone Weil


Pour en savoir plus sur la Form’action et s’y inscrire : ecologiehumaine.eu/formaction-eh

Découvrez également le témoignage de Laëtitia Pasquier, qui a participé à la form’action : “Vivre la Form’action écologie humaine et faire évoluer son regard sur le monde

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