Chaque mois, la maison des bouquins présente son coup de cœur lecture. Ce mois-ci, il s’agit du recueil Notre-Dame de Paris : Ô reine de douleur qui comprend des textes inédits ainsi que d’autres qui ont déjà été publiés dans « Petit traité sur l’immensité du monde » et « Une légère oscillation » de Sylvain Tesson, écrivain et voyageur, paru aux Éditions Équateurs. Les bénéfices de la vente seront reversés à la restauration de Notre-Dame ainsi qu’au patrimoine.
L’HISTOIRE
Sylvain Tesson entretient une relation forte et intime avec Notre-Dame, cette « île de pierre à explorer ». Il l’a maintes fois escaladée en voisin, y emportant des vers de Péguy. Pour lui, quiconque passera une nuit dans les coursives de ce vaisseau gothique sera métamorphosé. Il a cherché dans la nuit les traces de ses prédécesseurs, l’histoire gravée dans les murs. Plus tard, en convalescence d’un terrible accident, il s’est astreint chaque jour à gravir les escaliers en colimaçon de l’édifice. « Cinq mois auparavant, j’étais tombé sur mon ombre, mon corps était déchu. Je le montais vers le ciel pour le fortifier. »
Le monde entier pleure la tragédie du 15 avril parce que Notre-Dame symbolise la chrétienté au cœur large, un monument de l’âme, un refuge pour les croyants et les non-croyants, les vagabonds, les réprouvés et les poètes.
« Et si l’effondrement de la flèche était la suite logique de ce que nous faisons subir à l’Histoire ? L’oubli, le ricanement, la certitude de nous-même, l’emballement, l’hybris, le fétichisme de l’avenir… et un jour, les cendres. Peut-être un peuple va-t-il se porter au chevet de sa reine ? Peut-être va-t-il se souvenir qu’il n est pas né hier. Mais peut-être rien ne changera-t-il et continuerons-nous à nous espionner les uns les autres, à nous haïr, à nous conspuer. Alors on se dira que la flèche a bien fait de se retirer. »
L’AVIS D’ANNE
Le 15 avril, Notre-Dame a brûlé et ses voisins, ses thuriféraires, la France entière, assistaient consternés à l’impensable : le cœur de Paris se consumait, un des piliers de l’histoire de la chrétienté s’embrasait…
Dans ce très court opuscule, Sylvain Tesson offre un vibrant hommage à celle qui est le centre de la France et qui tient une place particulière dans son cœur : du temps où il se conduisait “en chat”, l’auteur escaladait la cathédrale pour lire des poèmes, bien planqué au-dessus de Paris ; du temps où il se relevait de son accident, elle fut sa rééducatrice… Et puis aujourd’hui…
La Forêt.
C’est ainsi que l’on nomme la charpente de Notre-Dame de Paris. On devrait dire la jungle car c’est un
enchevêtrement de poutres ajustées les unes aux autres sans rivets, ni chevilles : un mikado de châtaigniers. Ils
nous expliquèrent qu’on ne doit pas crucifier la poutre et que l’équilibre des forces,
la souplesse des bois et l’intelligence des géométries suffisent
à soutenir les deux cent dix tonnes du toit de plomb sans besoin de planter un seul clou.
Je ne rajouterai pas que l’écriture de l’auteur me souffle toujours autant : j’ai déjà du vous le dire.
EXTRAIT
« Notre-Dame est une cathédrale du Christ mais, chevet au Levant et tours au couchant, elle est également un temple solaire. Chaque jour, Paris changeait. Le ciel imprimait d imperceptibles nuances sur la ville. Paris prend mieux la lumière d’orage que la clarté d’azur. Tout ciel tragique grandit une ville. La capitale repose «sous le commandement des tours de Notre-Dame » comme l’écrivait Péguy. »
Sources : Critique complète sur la maison des bouquins