Que manger aujourd’hui pour prendre soin de demain ?

22 Avr, 2020 | CONSOMMATION

Que ce soit parce que Nous sommes ce que nous mangeons ou parce qu’Hippocrate nous soufflait Que ton aliment soit ton médicament, l’alimentation est au cœur de nos vies. Cette période de confinement accentue encore davantage cette réalité. Elle est aussi au cœur de notre impact – direct et personnel – sur la planète, puisque l’alimentation représente ¼ de nos émissions de gaz à effet de serre, d’après l’Agence de la transition écologique (ADEME).
Découvrez mes 10 conseils simples pour manger écolo, en se faisant autant (voire plus) plaisir, et en protégeant sa santé et son porte-monnaie.

À propos de l’auteur : Anne est diététicienne et psychonutritionniste. Elle est engagée dans une transition écologique personnelle depuis 2018, et s’est spécialisée dans la thématique de l’alimentation durable et positive. « Prendre soin de sa santé et celle de la planète » : son credo !

1. Mangez moins et mieux de viande

N’en déplaise à mes amis carnivores, si on veut manger de façon écologique, la première chose à faire est de revoir à la baisse sa consommation de viande, dont la production est l’une des activités les plus énergivores pour la planète.
D’après le Réseau Action Climat, la consommation de viande compte pour 50 % de l’empreinte de notre alimentation.
Ainsi, toute chose étant égale par ailleurs, un petit mangeur de viande (50 g par jour) émet 1,5 fois moins de gaz à effet de serre qu’un gros mangeur de viande (100 g par jour). Un végétarien en émet près de 2 fois moins.
Réduire sa consommation de viande, rouge notamment, est donc un geste qui compte si l’on veut prendre soin de la planète.

Action :
  • Réduire la fréquence de consommation de viande progressivement – Et pour commencer, rejoindre l’initiative Lundi Vert et apprendre à manger différemment chaque lundi.
  • Réduire les quantités consommées de viande progressivement. Pour de nombreux français, un repas sans viande ne serait pas un vrai repas. Pour respecter les traditions culinaires françaises, on peut, comme le recommande le chef Gilles Daveau, revisiter certaines recettes traditionnelles avec, par ex, un bœuf carotte avec un peu de bœuf et beaucoup de carottes !
  • Apprendre à choisir la viande : la race, le mode d’élevage et l’origine. Je recommande de donner la priorité aux volailles, poulet, dinde puis au porc puis limiter fortement votre consommation de bœuf, d’agneau, de veau et de canard (pour des questions de bien-être animal plus que d’écologie), pour les réserver aux grandes occasions et aux repas de fête. Côté mode d’élevage, selon le WWF (Fonds mondial pour la nature), la production biologique et le label rouge sont des labels de qualité qui requièrent des pratiques exemplaires en matière d’environnement et de bien-être animal. Enfin, bien sûr, priorité aux élevages français !

Si vous souhaitez approfondir ce thème, voici le lien vers mon podcast « Demain, je m’y mets ».

2. Mangez de saison, c’est mieux et c’est bon

Consommer de saison, c’est profiter de tous les bienfaits nutritionnels que nous offre la nature et répondre aux besoins spécifiques du corps. En hiver, avec le froid et le manque de soleil, notre corps réclame plus de nutriments et de vitamines. Hop, c’est la saison des légumes riches en minéraux (poireaux, choux, brocolis, carottes, etc.) et des agrumes pleins de vitamine C. En été, avec la chaleur, notre organisme demande plus d’eau : tous les fruits et légumes de la saison en sont gorgés !

Manger de saison, c’est aussi meilleur pour les papilles car ces produits seront mûrs et savoureux ; et enfin, c’est alléger l’empreinte environnementale : on évite les transports polluants et on dit au revoir aux productions sous serres et aux produits importés.

Par exemple, une tomate produite localement, mais hors saison (donc sous serre), génère 20 fois plus de gaz à effet de serre qu’une tomate locale produite au bon moment de l’année !

Action :

Affichez un calendrier des fruits et légumes de saison dans votre cuisine. Plusieurs sont disponibles gratuitement sur internet.

3. Mangez local et préférez les circuits-courts

Moins d’intermédiaires, c’est moins de pression sur les producteurs qui peuvent fixer eux-mêmes les prix de vente ; et souvent c’est aussi plus économique pour le consommateur.
Même si manger local n’est pas en soi un gage de qualité ni d’écologie, quand on cherche à consommer responsable, il semble naturel de soutenir nos agriculteurs français et ceux qui cultivent près de chez nous. Et – si possible – les encourager à produire en respectant des pratiques vertueuses en termes de recours aux pesticides.

Actions :
  • Achetez vos fruits et légumes directement auprès de vos producteurs locaux : fréquentez des magasins de producteurs, allez acheter directement vos produits à la ferme (ferme cueillettes, etc.) ou adhérer à l’association sociale et solidaire Les Jardins de Cocagne, à une AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) ou commander à la Ruche qui dit Oui !
  • Autant que possible, faites vos courses au marché et auprès de commerçants à proximité de votre domicile (boucherie, boulangerie, fromager, etc.)
  • Si ce n’est pas possible, scrutez l’origine des aliments, leur affichage est obligatoire et donnez la priorité aux produits français.

Si vous souhaitez approfondir ce thème, voici le lien vers mon podcast « Demain, je m’y mets ».

4. Soutenez les modes de production respectueux de la planète

Malgré la croissance phénoménale du marché bio en France (+15,7% en 2018 vs 2017) l’utilisation des pesticides a augmenté de 24 % en 2018 par rapport à 2017, et de 25 % en une décennie. Alors que tous les agriculteurs diront avoir la main légère sur les pesticides… Le label bio et les labels ci-après restent les meilleurs remparts pour notre santé et l’environnement.
Le bon choix pour être en pleine forme et préserver nos sols, c’est l’agriculture biologique ou raisonnée.
L’agriculture bio, c’est la garantie que les aliments sont cultivés sans engrais, ni pesticides chimiques de synthèse, sans OGM, sans additifs mais AVEC la nature puisqu’elle préserve, par conséquent, les eaux, les sols, et la biodiversité de nos campagnes (abeilles, vers de terre…).
Enfin, manger bio permet de prendre soin de sa santé en limitant les résidus de pesticides dans les aliments que nous ingérons, lesquels perturbent notre corps.

Actions :
  • Renseignez-vous sur le mode de production de votre maraîcher habituel. Tous les agriculteurs n’ont pas le label mais ils ne sont pas pour autant de gros utilisateurs de produits chimiques de synthèse. Toutefois, gardez en tête que pas de label = pas de garantie sur les méthodes de production.
  • Apprenez à reconnaître les bons labels bio :
AB (Agriculture Biologique) et Eurofeuille (Bio Européen)
Il s’agit d’un excellent label qui garantit un niveau d’exigence supérieur au label Bio français et européen. On le trouve essentiellement en magasin et épicerie bio, et reste encore confidentiel.
Ce label est un label bio de qualité va au-delà des critères européens sur plusieurs points, comme le fait qu’aucune trace d’OGM ne soit tolérée et que l’utilisation d’huile de palme soit proscrite.

5. « Mangez vrai » et limitez au maximum les produits ultra-transformés 

Manger sainement, c’est manger vrai. Des aliments naturels, bruts ou peu transformés, peu emballés.
Car même le meilleur des superfoods (baie de goji, spiruline et autres gingembre et curcuma …) ne saurait à lui seul vous apporter TOUT ce dont vous avez besoin. La clé de l’équilibre alimentaire c’est bien la variété !

Les produits ultra-transformés sont nombreux dans nos assiettes : gâteaux industriels sucrés, biscuits apéritif, chips, soupes instantanées ou prêtes à l’emploi, sauces type ketchup/mayonnaise, nuggets de volaille et de poisson, cordon bleu, jambon (contenant nitrites et conservateurs ajoutés), plats cuisinés congelés, pizzas, quiches, plats prêts à consommer, pains et brioches industriels, pains de mie, barres chocolatées, poudres chocolatées (parfois, entre 75 et 85% de sucre), céréales du petit déjeuner, certains yaourts aux fruits, crèmes glacées, sodas, boissons sucrées aromatisées, jus de fruits reconstitués, etc. Ils ont souvent une empreinte carbone bien plus élevée que leurs équivalents fait maison.
Ils contiennent souvent des ingrédients industriels parmi les plus polluants (viandes industrielles), des sucres et des graisses raffinés ayant totalement perdus leurs richesses en nutriments, des additifs indésirés qui fatiguent votre corps, détruisent et polluent la planète en étant issus de l’agro-industrie mondiale.
Tous ces ingrédients et additifs de mauvaise qualité dérégulent les processus naturels de régulation de l’appétit faim/satiété et sont fabriqués dans des conditions déplorables (comme l’huile de palme qui contribue à déforester les forêts primaires principalement en Indonésie ou le chocolat industriel qui massacre la Côte d’Ivoire ou l’Amazonie)

Enfin, et sans vouloir être trop alarmiste, une consommation trop régulière de ces produits augmente la survenue de maladies chroniques : surpoids, diabète, obésité, hypertension… Selon l’Inserm, une augmentation de 10 % de la proportion d’aliments ultra-transformés dans le régime alimentaire s’est révélée être associée à une augmentation de plus de 10 % des risques de développer un cancer au global et un cancer du sein en particulier.

Actions :
  • Mangez vrai ! Préférez les produits bruts, peu ou pas transformés, peu ou pas emballés dans du plastique
  • Limitez l’achat des produits qui comportent plus de 5 ingrédients ou qui contiennent des ingrédients que vous ne connaissez pas : sirop de sucre inverti, gomme de xanthane, glutamate de sodium, nitrate de sodium, et la litanie des E… !

6. Faites vos courses en vrac

Faire ses courses en vrac, c’est bon pour la planète car ça limite le poids des déchets ménagers à recycler, qui requiert beaucoup d’énergie. Ainsi, le clan des « zéro déchet », dont je me revendique, clame haut et fort que le meilleur déchet, c’est celui qui n’existe pas !, comprenez bien qu’il soit en plastique, en verre ou en carton…
Toutefois, le plus gros fléau concerne le plastique ; il est partout dans notre quotidien et sa composition et sa production de masse sont de plus en plus néfastes pour l’environnement.
(Le Parlement européen a d’ailleurs entériné l’interdiction du plastique à usage unique dans l’UE dès 2021).
Aujourd’hui, 150 millions de tonnes de plastique se retrouvent dans l’océan, selon WWF. Des scientifiques parlent même d’un « septième continent plastique » pour désigner une décharge flottante située dans l’océan Pacifique. S’en passer c’est donc bon pour la planète !

Mais c’est aussi bon pour la santé car on évite le passage de microparticules de plastique dans nos aliments et donc dans notre corps ; Ces microparticules étant reconnues comme toxiques pour notre organisme.

Actions :
  • Faites vos courses le plus souvent possible au marché et mettez vos produits directement dans votre panier, sans emballage.
  • Pour les produits secs, ayez toujours un tote bag et quelques sachets tissus ou papier sur vous pour vous arrêter à l’épicerie vrac du coin. Pas besoin de trimballer vos gros bocaux, vous effectuerez le transfert chez vous.
  • Ayez le réflexe de dire « non merci » à la boulangerie, à la boucherie pour le sac en plastique ou à la pharmacie. Ces petits actes militants s’ils s’accumulent peuvent changer la donne !

Si vous souhaitez approfondir ce thème, voici le lien vers mon podcast « Demain, je m’y mets ».

7. Consommez des poissons issus de la pêche durable

D’après une enquête menée par UFC Que Choisir, 86 % des poissons sur les étals sont pêchés selon des méthodes non durables ou dans des stocks surexploités.

D’après l’économiste britannique Colin Clark, la pêche durable, c’est une pêche qui peut être pratiquée éternellement ! Les ressources renouvelables possèdent, par définition, une capacité d’auto-régénération et peuvent fournir à l’homme, biens et services essentiels à tout jamais. 
Sur le site de l’association Bloom qui œuvre pour le bien commun en créant un pacte durable entre l’homme et la mer, il est expliqué que la pêche durable comprend plusieurs dimensions : elle se pratique sur une réserve d’espèces cohérentes, avec une méthode de pêche la plus douce possible pour préserver l’écosystème et limiter au maximum ses rejets et doit enfin permettre de rémunérer justement les pécheurs et de favoriser les communautés littorales.

Actions :
  • Diversifiez vos achats en privilégiant les espèces dont les stocks sont les plus fournis (par exemple lieu noir, merlan, hareng, maquereau) et en proscrivant les achats de poissons de grands fonds (notamment sabre noir, grenadier de roche, lingue bleue, empereur) du fait de la grande fragilité de leurs stocks ». 
  • Téléchargez gratuitement l’appli MrGoodFish afin d’identifier les produits de la mer à consommer, en fonction des saisons, les poissonneries responsables et d’apprendre à bien les cuisiner.
  • Apprenez à repérer les labels pêche durable :
MSC (Marine Shepward Council)
Ce label co-créé par Unilever et WWF a pour objectif de maintenir les stocks de poissons et les écosystèmes marins en bonne santé. Ce label est controversé et accusé de certifier des pêcheries contribuant à la surexploitation des espèces.
ASC (Aquaculture Stewardship Council)
Ce label est également à l’initiative du WWF : c’est l’équivalent du MSC pour les poissons d’élevage.
Encore confidentiel, ce label présente un cahier des charges assez strict. Il concerne la pêche artisanale (bateaux de moins de 14 mètres) et cherche à valoriser la pêche responsable en intégrant des critères environnementaux, sociaux et économiques.
Label français initié par le ministère de la Transition écologique en 2017. Les pêcheries labellisées doivent minimiser leur impact sur le stock de poissons et limiter leur usage d’énergies fossiles.


Enfin deux autres logos qui représentent la filière française de la pêche à ne pas confondre : pêche durable et responsable (lancé en 2008) et  Pavillon France (qui garantit des conditions de sécurité, de travail ou encore de qualité sanitaire, mais pas de durabilité)

8. Luttez contre le gaspillage alimentaire et cuisinez vos restes !

En France, on jette environ 29 kg d’aliments par personne à la poubelle chaque année. Au niveau national l’ambition du gouvernement est de diviser de 50% le gaspillage alimentaire d’ici 2025.

Actions :
  • Quand c’est possible, préparez vos menus et faites une liste de course à l’avance (pour limiter les achats impulsifs et souvent pas les meilleurs pour la planète) !
  • Bien gérer ses stocks grâce à la méthode « First In, First Out » = « Premier arrivé, Premier sorti » pour éviter de découvrir au fond du frigo des aliments qui auraient été mal rangés puis oubliés.
  • Téléchargez l’application Too Good To Go ou Phénix : restaurateurs et commerçants partenaires proposent leurs invendus du jour sous forme de paniers surprises, avec une réduction de 30 % à 50 % sur leur prix d’origine.
  • Cuisinez les restes et donnez une nouvelle vie aux co-produits de vos recettes : pain perdu, croûtons, pesto de fanes de radis, meringues, gratins de pâtes ou quiches « fourre-tout », les idées sont aussi nombreuses que délicieuses et le numérique vient à notre aide. Coup de cœur pour l’appli Frigo Magic (30 min. pour réaliser une recette à partir d’un ingrédient de votre frigo).
  • Devenez des pro des bocaux ! Cette forme de conservation ne nécessite aucune énergie (comparé aux surgelés par exemple), ni additifs, ni conservateurs. C’est « antigaspi » car on peut utiliser des légumes fatigués, moches ou « en trop » : vous savez ceux qui poussent en abondance pendant quelques semaines seulement et que certains jettent tant ils ne peuvent plus les conserver.

9. Limitez la consommation d’aliments exotiques

Les fruits et légumes exotiques (tels que l’avocat, l’ananas, le litchi, la mangue, les fruits de la passion…) sont facilement accessibles dans nos supermarchés. De quoi nous faire oublier qu’ils ne poussent pas en France ! Même s’ils sont “de saison” dans leur pays de production, n’oublions pas que ces derniers viennent de loin et ont un impact environnemental non négligeable (surtout s’ils sont transportés en avion).
Quid de la banane ? Deuxième fruit préféré des Français, la banane a tout bon, côté nutrition, puisqu’elle est riche en fibres, en potassium, en vitamine B6. Que l’on se rassure, on peut être écolo et manger des bananes car son bilan carbone s’élève à peine à 80 g eq. C02 / banane.
Si on les cultive à des milliers de kilomètres de chez nous, 99 % des bananes vendues en Europe voyagent par bateau (par avion leur bilan carbone serait 100 fois plus élevé).
Source : livre « How bad are bananas ? The carbon footprint of everything », de Mike Berners-Lee et Bon pour le climat.

Action :

Gardez les fruits et légumes exotiques pour une consommation occasionnelle. Une fois de temps en temps, pour le plaisir ! Et comme toujours, préférez-les bio et équitables !

10. Goûtez pleinement

« Goûter, c’est rendre hommage à nos corps et à nos précieux sens, mais aussi au travail de tous ceux qui participent à la longue chaîne humaine qui aboutit à ce qui arrive dans notre assiette. C’est aussi honorer le Créateur de toute chose » nous rappelait Tugdual Derville dans 67 recettes de Bonheur.

Actions :
  • Rendez grâce pour la nourriture reconnue comme un don de la Création et bénissez ceux qui ont préparé le repas.
  • Mangez en pleine conscience : goûter la 1ère bouchée en fermant les yeux pour découvrir les saveurs du plat, avec curiosité et délectation.

Pour finaliser cette recette en 10 ingrédients pour bien manger aujourd’hui pour prendre soin de demain, j’ajoute une bonne dose de bon sens, beaucoup de gourmandise, une pincée de conscience : c’est prêt, régalez-vous !

Je vous souhaite de découvrir à votre rythme, votre incroyable pouvoir – chacun d’entre nous le possède et peut l’exercer 3 fois par jour – d’agir pour accélérer la transition environnementale, une bouchée après l’autre !

Et pour aller plus loin, deux recommandations lectures : Manger responsable, Juliette Legros / Je cuisine écolo ou presque, Louise Browaeys & Hélène Schernberg

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