Après une expérience marquante dans les bidonvilles de Jakarta, Romain Mailliu saisit une perche qui lui est tendue par Life Project for Youth ; c’est ainsi qu’avec toute une équipe, il se lance dans le tournage d’un documentaire qui sortira au cinéma en 2025. Son objectif ? Briser les idées reçues sur la pauvreté, partager son admiration pour les jeunes rencontrés et encourager le passage à l’action pour plus d’inclusion.
1 an dans les bidonvilles de Jakarta : une expérience transformante
Romain Mailliu, ingénieur, co-fondateur de Youth Visions : “Je suis parti en volontariat de solidarité internationale avec l’association Life Project 4 Youth, dans les bidonvilles de Jakarta, en Indonésie, pendant un an. Je devais y accompagner des jeunes entre 17 et 24 ans pour qu’ils comprennent le fonctionnement d’une entreprise et les “codes” du monde professionnel. Nous développions des start up répondant aux besoins des communautés locales – par exemple l’accès à l’eau potable. Le but était de permettre aux jeunes d’acquérir une expérience professionnelle valorisable sur un CV et d’avoir confiance en leurs capacités. L’expérience et la confiance en soi leur permettant ensuite de trouver plus facilement un travail décent, bien qu’lis n’aient souvent pas fait d’études supérieures.
Qu’est-ce qu’un travail décent, me demanderez-vous ? Un travail avec un contrat, des jours de congé, une rémunération minimum légale et une assurance santé. Un travail qui dégage les horizons – en offrant l’assurance de pouvoir se nourrir au quotidien – et permette alors de s’engager dans des projets sur le long terme, en d’autres mots de construire un projet de vie.
Comment partager une telle expérience, en rentrant en Europe ?
En revenant en Europe, j’ai travaillé un an à Paris, puis un an à Londres, en ayant à cœur de partager les enseignements tirés de cette expérience indonésienne avec mon entourage. Mais comment faire ? J’ai commencé par créer un magazine en ligne – Prendstadose – mais mes proches m’ont rapidement fait comprendre qu’en rentrant chez eux, le soir, après leur journée de travail, ils n’avaient pas envie de se plonger dans la lecture d’un web magazine ! Comme moi, ils ont plutôt tendance à se mettre devant Netflix.
Je me suis donc dit que le cinéma pouvait être un bon médium pour entrer en immersion dans la vie de ces jeunes des quartiers pauvres, pour ouvrir des fenêtres sur d’autres réalités de notre monde.
La naissance de Youth Visions : concordance des énergies
Le projet Youth Visions est né grâce à 3 acteurs :
- Life Project 4 Youth qui cherchait à sensibiliser le grand public sur la situation des jeunes adultes en situation d’extrême pauvreté,
- Moi, Romain, à Londres, qui cherchait un medium efficace pour plonger les gens dans une autre réalité et briser les idées reçues sur les jeunes et la pauvreté,
- Rachel, la réalisatrice, qui a travaillé 2 ans dans les bidonvilles du Liban et de l’Inde et qui a accepté de me rejoindre pour ce projet de film et pour le recrutement de l’équipe qui nous accompagne aujourd’hui.
On a donc pu se lancer dans cette folle aventure grâce à l’alliance entre une équipe de professionnels du cinéma et une équipe de “communicants” ayant presque tous déjà fait l’expérience des bidonvilles.
Youth Visions : 4 jeunes aux grands rêves valorisés
Youth Visions est un film documentaire, réalisé pour le cinéma, qui entre en immersion dans la vie de 4 jeunes :
- À Paris, Mamadou, Guinéen de 26 ans, rencontre Marianne, scénariste, avec qui il écrit un film sur l’arrivée en France d’un migrant, inspiré de sa propre histoire.
- Dans le Akkar – région rurale au nord du Liban – Soumayraa développe à 23 ans une ONG pour soutenir les femmes de sa communauté, les encourager à être plus indépendantes et (re)créer du lien entre elles, notamment grâce à la photographie.
- À Delhi, Laxmi, 24 ans, participe à la création d’une comédie musicale, inspirée de son propre parcours, dans laquelle elle tient le rôle principal. L’histoire d’une jeune Indienne qui veut devenir danseuse malgré les réticences de sa famille et le babillage du voisinage.
- À Jakarta, Dian, 21 ans, nous fait découvrir le bidonville dans lequel elle a grandi. Passionnée de peinture, elle révèle à travers ses dessins l’évolution de son territoire : montée du niveau de la mer et inondations ; expansion de l’agriculture, construction d’autoroutes et expulsion des populations les plus pauvres.
Ces quatre jeunes se retrouvent à New-York où ils sont invités à témoigner Nations-Unies et deviennent amis.
Voilà ce que va raconter ce documentaire ; on a tourné dans 5 pays en 2023 : France, Inde, Indonésie, Liban et États-Unis. Nous avons aujourd’hui 80 heures de rushes, que l’on a commencé à monter. L’objectif est de pouvoir sortir en salle en 2025.
Porter la voix des jeunes et briser les idées reçues
Parce qu’on en a, des idées reçues, sur la pauvreté ! De mon côté, par exemple, avant de vivre mon expérience de volontariat, j’avais tendance à penser que les jeunes vivant dans des quartiers pauvres étaient dans l’incapacité d’agir, engoncés dans une situation de grande détresse, misérables et tristes.
Or, je me suis vite rendu compte sur le terrain qu’ils avaient un esprit entrepreneurial très développé, une grande capacité d’adaptation et d’action, doublée d’une sensibilité très juste, pour considérer une personne ou une situation ; en plus d’une formidable énergie et joie – décorrélée de quelconque ressource matérielle ou financière – et la volonté de construire un monde en commun.
Et c’est tant mieux parce qu’on estime que, dans le monde, 1 jeune sur 3 vit dans un bidonville – soit 800 millions de jeunes ; c’est énorme !
À travers ce film, on veut porter les voix des jeunes qui sont trop peu représentés dans les médias ; leur parole est importante et légitime dans le débat publique. Et grâce à cela, on souhaite ouvrir des fenêtres sur d’autres réalités : avoir une vie pauvre n’est pas avoir une pauvre vie ! Nous avons beaucoup de choses en commun, à partager ensemble.”
Accéder au site de Youth Visions : https://www.youth-visions.com/
